Charlélie Desrumeaux |
Laurent Micas: Ton handicap est de naissance?
Charlélie Desrumeaux: Oui, et je vis parfaitement avec cette différence, si différence il y a. Car je ne connais pas le vrai son des entendants. Ça reste un monde méconnu pour moi.
Charlélie Desrumeaux: Non, les appareils auditifs me raccordent aux entendants. Et, si je veux, j'ai la chance de pouvoir couper ce lien lorsque je veux être dans le silence.
Laurent Micas: Avec un orthophoniste, tu as appris a parlé. Ce ne doit pas être facile.
Charlélie Desrumeaux: C'est un peu comme si tu apprenais le chinois. Tu n'as aucun repère. Et moi j'ai appris le français car ma "langue maternelle" est le monde des sourds. Je lis aussi sur les lèvres. Ça aussi, il m'a fallu l'apprendre.
Laurent Micas: Tu "entends" alors ce que les gens murmurent?
Charlélie Desrumeaux: En quelques sortes. Mais je l'explique à mes clients et ensuite ils font attention.
Laurent Micas: As-tu eu des clients qui refusent que tu les coiffes à cause de ta surdité?
Charlélie Desrumeaux: Non. Souvent, ils ne font pas attention, ne remarquent qu'une légère différence dans la prononciation et me demandent d'où me vient cet accent, si je suis anglais...
Charlélie Desrumeaux: Effectivement, je fais parfois des shootings pour les magazines réunionnais et je coiffe des journalistes de la chaîne de télévision locale. Mais tout cela prend beaucoup de temps et j'ai un salon à tenir! Dans ce dernier, je travaille seul, avec mon ami à la réception.
Laurent Micas: C'est un choix d'être seul coiffeur?
Charlélie Desrumeaux: Oui, dans le salon précédent, j'avais interrogé mes clients à ce sujet. Chacun voulait pouvoir profiter d'un espace privatisé où il serait seul. Cela crée un rapport de proximité entre eux et moi, dans une ambiance très familiale.
Laurent Micas: Y a-t-il une chose à laquelle tu penses pour conclure?
Charlélie Desrumeaux: Oui, que même un sourd, ou tout autre handicapé, peut surmonter ce handicap pour intégrer le monde de la coiffure et s'épanouir.
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